Page:Grenier - La Mort du Juif-errant, 1857.djvu/63

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Je fis brûler dans l’âtre un vieux tronc de mélèze ;
Je m’assis devant lui pour le voir plus à l’aise ;
Et, tandis qu’au dehors l’eau ruisselait à flots,
Ahasver commença son récit en ces mots :

« Le monde entier connaît mon crime et ma démence ;
Mais ce qu’il ne sait pas, c’est la misère immense
Qui fut mon châtiment, hélas ! trop mérité :
Le plus grand des forfaits, c’est l’inhumanité !
Longtemps, comme un feu lent qui sous la cendre brûle,
Comme un poison caché qui dans nos flancs circule,
La malédiction qui pesait sur mon front
Me laissa respirer dans un calme profond.
Dieu seul est patient : lui seul aussi peut l’être ;
Car du temps fait pour nous l’Éternel est le maître.