Page:Grenier - Souvenirs littéraires, 1894.djvu/45

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génie. Tout le monde fut admis à le voir. Adam Salomon en fit une photographie et de Rudder un dessin. On oublia de prendre son masque et je le regrette. Je l’eusse mis à côté de celui de Mirabeau et de celui de Goethe, qu’Ary Scheffer m’a donné. Le 3 mars, le cercueil partit pour Saint-Point, sous la conduite pieuse de Louis de Ronchaud et d’un petit-neveu du poète, M. de Montherot. Un groupe d’amis ou d’anciens collègues, parmi lesquels je reconnus Garnier-Pagès, Henri Martin et Arnaud de l’Ariège, Émile Augier en académicien, étaient réunis sur le quai avec quelques chroniqueurs de journaux. On se découvrit quand le convoi s’ébranla. Et ce fut tout. Nul discours, nul adieu. Lamartine avait voulu que le silence qui s’était fait autour de ses dernières années l’accompagnât dans la mort. C’était bien, c’était mieux. Et c’est ainsi qu’il quitta ce Paris, qui avait été pour lui si oublieux, si ingrat, on pourrait même dire si dur et si outrageux par moments. Mais la justice se lève tôt ou tard, et elle a commencé pour Lamartine. La postérité remet tout à sa vraie place, et son centenaire l’a bien prouvé : il a été un triomphe.

Telles ont été la fin et les dernières années de cet homme extraordinaire. Si j’écrivais ici un portrait littéraire ou une biographie, j’aurais à montrer en détail le grand rôle qu’il a joué dans la poésie et la politique de notre siècle. J’aurais à