Page:Gresset - Ver-vert ou le voyage du perroquet de Nevers, 1735.djvu/13

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Instruit, formé par leurs leçons fréquentes,
bien-tôt l'eleve égala ses régentes ;
de leur ton même, adroit imitateur,
il exprimoit la pieuse lenteur,
les saints soupirs, les notes languissantes
du chant des sœurs, colombes gémissantes ;
finalement, Ver-Vert sçavoit, par cœur,
tout ce que sçait une mere de chœur.
Trop resserré dans les bornes d'un cloître,
un tel mérite au loin se fit connoître ;
dans tout Nevers, du matin jusqu'au soir,
il n'étoit bruit que des scenes mignones
du perroquet des bienheureuses nones ;
de Moulins même on venoit pour le voir.
Le beau Ver-Vert ne bougeoit du parloir.
Sœur Mélanie, en guimpe toûjours fine,
portoit l'oiseau : d'abord, aux spectateurs,
elle en faisoit admirer les couleurs,
les agrémens, la douceur enfantine ;
son air heureux ne manquoit point les cœurs.
Mais la beauté du tendre Néophite
n'étoit encor que le moindre mérite ;

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on oublioit ses attraits enchanteurs,
dès que sa voix frappoit les auditeurs.
Orné, rempli de saintes gentillesses
que lui dictoient les plus jeunes professes,
l'illustre oiseau commençoit son récit ;
à chaque instant, de nouvelles finesses,
des charmes neufs varioient son débit ;