Page:Gresset - Ver-vert ou le voyage du perroquet de Nevers, 1735.djvu/15

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ce tems critique où s'éclipse sa gloire.
ô crime ! ô honte ! ô cruel souvenir !
Fatal voyage ! Aux yeux de l'avenir,
que ne peut-on en dérober l'histoire ?
Ah ! Qu'un grand nom est un bien dangereux ?
Un sort caché fut toûjours plus heureux.
Sur cet exemple, on peut ici m'en croire ;
trop de talens, trop de succès flatteurs
traînent souvent la ruine des mœurs.
Ton nom, Ver-Vert, tes proüesses brillantes
ne furent point bornés à ces climats ;
la renommée annonça tes appas,
et vint porter ta gloire jusqu'à Nantes.
Là, comme on sçait, la visitation
a son bercail de révérendes meres,
qui, comme ailleurs, dans cette nation,

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à tout sçavoir ne sont pas les dernieres ;
par quoy, bien-tôt, apprenant des premieres
ce qu' on disoit du perroquet vanté,
desir leur vint d'en voir la vérité.
Desir de fille est un feu qui dévore,
desir de none est cent fois pis encore.
Déja les cœurs s'envolent à Nevers,
voilà, d'abord, vingt têtes à l'envers
pour un oiseau. L'on écrit tout à l'heure
en nivernois à la supérieure,
pour la prier que l'oiseau plein d'attraits
soit, pour un tems, amené par la Loire ;
et que, conduit aux rivages nantais,
lui-même