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Page:Gresset - Ver-vert ou le voyage du perroquet de Nevers, 1735.djvu/23

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prostitué ses talens et son cœur.
Déjà, pourtant, on approche de Nantes,
où languissoient nos sœurs impatientes ;
pour leurs désirs le jour trop tard naissoit,
des cieux, trop tard, le jour disparoissoit.
Dans ces ennuis, l'espérance flateuse,
à nous tromper toujours ingénieuse,
leur promettoit un esprit cultivé,
un perroquet noblement élevé,
une voix tendre, honnête, édifiante,
des sentimens, un mérite achevé :
mais, ô douleur ! ô vaine et fausse attente !
La nef arrive, et l'équipage en sort.
Une tourriére étoit assise au port
dès le départ de la premiere lettre :
là, chaque jour, elle venoit se mettre ;
ses yeux errans sur le lointain des flots,

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sembloient hâter le vaisseau du héros.
En débarquant auprès de la béguine,
l'oiseau madré la connut à la mine,
à son œil prude ouvert en tapinois,
à sa grand' coëffe, à sa fine étamine,
à ses gants blancs, à sa mourante voix,
et, mieux encore, à sa petite croix :
il en frémit, et même il est croyable,
qu'en militaire, il la donnoit au diable ;
trop mieux aimant suivre quelque dragon,
dont il sçavoit le bachique jargon,
qu'aller apprendre encor les litanies,
la revérence, et les cérémonies :
mais force