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Page:Groulx - Mes mémoires tome I, 1970.djvu/193

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XIX

OÙ JE COMMENCE À M’EXTÉRIORISER

Années d’action fiévreuse que les années 1909 à 1915 à Valleyfield. Mes tâches multiples dévorent chacune de mes journées. J’arrive à joindre les deux bouts je ne sais comment. Pourquoi a-t-il fallu qu’à ces tâches j’en aie ajouté d’autres ? Pourquoi d’imprudents amis m’y ont-ils tant invité, tant attiré ? S’extérioriser, ajouter à sa vie, à son devoir d’état, une tranche marginale s’élargissant jusqu’à l’excès, tentation, écueil trop souvent des hommes d’action. Danger de s’éparpiller, de se répandre au lieu de s’approfondir ; danger d’exiger trop de son organisme. Mais le moyen aussi de se refuser à des œuvres où le mirage vous fait croire utile, indispensable, et qui trouvent pour vous embrigader d’opiniâtres solliciteurs. Faiblesse ou complaisance qui ne savent plus, quand il est temps, répondre : Non ! Mais encore là, fallait-il soupçonner quelque plan secret de la Providence ?

Tout jeune séminariste, les circonstances ont voulu que j’aie pris une part assez active à la fondation de l’Association catholique de la Jeunesse canadienne-française. En 1910, je prononce un petit discours devant l’une des sections du Congrès eucharistique international à Montréal, réservée à la jeunesse. Discours qui passe assez inaperçu. De santé débile, trop surmené, je manque de la vigueur physique qui aurait pu donner à mon débit, à mon action, quelque puissance. Je mis du temps à retrouver la verve ou l’action oratoire de ma première jeunesse. L’aumônier de l’ACJC, le Père Hermas Lalande, s.j., m’invite à collaborer au Semeur, organe de l’Association. En 1913, il y a congrès aux