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la pensée hindoue

rialiste et subversif des Çârvâkas (ou Lokâyatas), dont le fondateur, Vrihaspati, enseignait que les organes des sens produisent la pensée « comme le mélange du sucre et d’autres substances produit une liqueur enivrante ». « Il n’y a, disait encore Vrihaspati, ni ciel, ni libération finale, ni âme, ni autre monde, ni rites de caste, ni récompense pour la vertu. Le sacrifice védique et le bâton de l’ascète, tout cela sert de métier à ceux qui n’ont ni intelligence ni énergie virile. Si l’homme après la mort revit en d’autres mondes, pourquoi n’en revient-il jamais, attiré par son affection pour les siens ? »

Ces lignes sont curieuses par ce qu’à côté de l’Inde mystique que nous sommes accoutumés à voir, elles nous montrent une Inde libre penseuse et voltairienne assez inattendue. Mais les Çârvâkas ne constituent qu’une infime exception. Qui veut connaître la pensée indienne doit étudier principalement les cinq Darçanas ou Écoles officielles que nous venons d’énumérer.

Pour la commodité de notre exposition, nous grouperons ces cinq Écoles sous deux grandes rubriques : d’abord les écoles proprement religieuses ou du Vedânta. Puis les écoles rationalistes, Vaiçeshika et Sâmkhya[1].

  1. Voir dans notre préface la justification de cette classification.