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DE FRÉDÉGAIRE.

jusqu’à ce que le roi décidât, par une sentence, ce qui lui plairait.

Le saint de Dieu s’aperçut qu’il n’était gardé ni outragé par personne ; car tout le monde voyait briller en lui la vertu de Dieu, ce qui empêchait qu’on ne lui fît aucune injure, de peur de participer au crime commis contre lui. Il monta un dimanche sur une cime escarpée, car telle est la position de la ville que les maisons sont bâties sur le penchant rapide de la montagne, franchissant des lieux d’un difficile accès et entourés de tous côtés par le fleuve du Doubs ; le saint attendit là jusqu’au milieu du jour, regardant au loin si quelqu’un était posté pour l’empêcher de retourner au monastère. Comme personne ne paraissait, il traversa la ville avec les siens et rentra dans sa retraite. À la nouvelle qu’il avait quitté le lieu de son exil, Brunehault et Théodoric, animés d’une plus violente colère, envoyèrent pour le chercher, sans retard, le comte Berthaire et Baudulf, dont nous avons parlé plus haut, avec une troupe de guerriers. Ils trouvèrent saint Colomban dans l’église, chantant des psaumes et des oraisons avec toute la communauté des frères, et ils parlèrent ainsi à l’homme de Dieu : « Nous te prions d’obéir aux ordres du roi et aux nôtres, et de retourner à l’endroit d’où tu es revenu ici. » Mais il répondit : « Je ne crois point qu’il plaise au Créateur que je retourne dans un lieu d’où je me suis éloigné pour obéir à la voix terrible du Christ. » Voyant que l’homme de Dieu n’obéissait pas, Berthaire se retira, laissant quelques hommes d’un esprit plus hardi. Ceux-ci prièrent l’homme de Dieu d’avoir pitié d’eux, qui avaient été