Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/69

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sans pouvoir y parvenir ; en sorte que, forcée par la nécessité, elle se rendit dans la ville d’Arles avec l’abbesse qu’elle avait instituée. Là, elles embrassèrent la règle de saint Césaire et sainte Césarie, et ne pouvant obtenir que celui qui aurait dû être leur pasteur s’occupât de les défendre, elles se mirent sous la protection du roi. De là s’élevèrent des différends qui s’aigrirent de jour en jour, jusqu’au temps où sainte Radegonde passa de ce monde dans l’autre. Après sa mort l’abbesse demanda de nouveau à vivre sous la puissance de son évêque. Celui-ci voulut d’abord refuser ; mais ensuite conseillé par les siens, il promit de leur servir de père, comme cela était convenable, et de prendre leur défense lorsqu’elles en auraient besoin ; en sorte que s’étant rendu vers le roi Childebert, il en obtint un diplôme pour gouverner régulièrement ce monastère comme ses autres paroisses ; mais je ne sais quoi demeurait encore, je crois, dans son âme et devint, à ce qu’assurent ces filles, la cause de nouvelles discordes.

Celles-ci étant, comme nous l’avons dit, dans l’intention d’aller se présenter au roi, nous leur donnâmes conseil, et leur dîmes : « Votre projet est tout à fait contraire à la raison, et on ne peut vous faire entendre les choses qui vous préserveraient du blâme ; mais si, comme nous vous l’avons dit, vous méprisez la raison et ne voulez pas accepter un conseil salutaire, considérez au moins qu’il vaut mieux laisser passer ce temps d’hiver, et qu’à l’arrivée du printemps, lorsque les vents seront plus doux, vous pourrez aller où votre volonté vous conduit. Elles accédèrent à ce conseil prudent, et