Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/131

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leur chevelure et de le tuer ; il ordonna alors qu’on leur tranchât la tête à tous deux. Après leur mort, il s’empara de leur royaume, de leurs trésors et de leurs sujets.

Il y avait alors à Cambrai lui roi nommé Ragnachaire, si effréné dans ses débauches qu’à peine épargnait-il ses proches parens eux-mêmes. Il avait un conseiller nommé Farron, qui se souillait de semblables dérèglemens. On rapporta que lorsqu’on apportait au roi quelque mets ou quelque don, ou quelque objet que ce soit, il avait coutume de dire que c’était pour lui et son Farron, ce qui excitait chez les Francs une indignation extrême. Il arriva que Clovis ayant fait faire des bracelets et des baudriers de faux or (car c’était seulement du cuivre doré), les donna aux Leudes[1] cxiv de Ragnachaire pour les exciter contre lui. Il marcha ensuite contre lui avec son armée. Ragnachaire avait des espions pour reconnaître ce qui se passait. Il leur demanda, quand ils furent de retour, quelle pouvait être la force de cette armée. Ils lui répondirent : « C’est un renfort très considérable pour toi et ton Farron. » Mais Clovis étant arrivé lui fit la guerre. Ragnachaire voyant son armée défaite, se préparait à prendre la fuite lorsqu’il fut arrêté par les soldats, et amené, avec son frère Richaire, les mains liées

  1. Les Leudes ou Fidèles étaient les compagnons des chefs barbares, les hommes qui s’attachaient à leur personne, formaient leur bande, les suivaient à la guerre, leur promettaient fidélité, et en recevaient en échange des présens qui furent d’abord, comme le dit Tacite, des chevaux, des armes, et plus tard des terres ; les Leudes devinrent alors des vassaux. (Voir à ce sujet les Essais sur l’Histoire de France, par M. Guizot, 4° Essai, chap. 1, au § des Bénéfices, chap. 2, au § des Leudes)