Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/211

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trois ou quatre clartés très grandes et très brillantes que les paysans appelaient des soleils, et ils disaient : « voila dans le ciel trois ou quatre soleils. » Et une fois, au commencement du mois d’octobre, le soleil parut tellement obscurci qu’on n’en voyait pas reluire la quatrième partie, mais qu’il paraissait sombre, décoloré et semblable à un sac xxxiv ; et une de ces étoiles que l’on appelle comètes, portant un rayon semblable à un glaive, se montra au-dessus du pays pendant une année entière. On vit le ciel ardent, et il apparut beaucoup d’autres signes. Dans une église d’Auvergne [in ecclesia Arverna], au moment où l’on célébrait, dans une certaine fête, la vigile du matin, un oiseau de ceux que nous appelons alouettes entra et éteignit avec ses ailes toutes les lumières qui brillaient dans l’église. On eût dit qu’un homme, les tenant à sa main, les avait toutes à la fois plongées dans l’eau. Puis passant sous le voile du sanctuaire, l’oiseau voulut éteindre la lampe, mais les portiers xxxv l’en empêchèrent, et le tuèrent. Un autre oiseau en fit autant aux lampes qui brûlaient dans la basilique de saint André, et la peste survenant, il y eut dans tout le pays une telle mortalité sur le peuple, qu’il est impossible de compter les multitudes qui périrent. Comme les cercueils et les planches manquaient, on en enterrait dix et plus dans une même fosse ; on compta, un dimanche, dans une basilique de saint Pierre, trois cents corps morts. La mort était subite ; il naissait dans l’aine ou dans l’aisselle une plaie semblable à la morsure d’un serpent ; et ce venin agissait tellement sur les hommes qu’ils rendaient l’esprit le lendemain ou le troisième jour xxxvi ; et la force du venin leur ôtait entièrement le sens.