Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/300

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lence de sa fièvre, la force défaillit à son corps, et il rendit son âme malheureuse, laissant après lui des signes certains que cela lui était arrivé en vengeance du saint évêque, car son cadavre devint si noir qu’on aurait cru qu’il avait été brûlé par des charbons ardents. Que tous donc s’émerveillent, admirent et craignent de faire injure aux évêques ! car Dieu venge ses serviteurs qui espèrent en lui.

En ce temps mourut le bienheureux Martin, évêque de Galice. Le peuple le pleura beaucoup. Il était né en Pannonie, et, passant de là dans l’Orient, pour visiter les lieux saints, il s’était tellement adonné à l’étude des lettres que de son temps aucun ne fut égal à lui. Il vint de là en Galice, où, ayant porté des reliques de saint Martin, il fut sacré évêque lxxxvii. Il accomplit dans le pontificat environ trente années, et, plein de vertus, alla ensuite trouver le Seigneur. C’est lui qui a composé les vers lxxxviii qu’on voit sur la porte méridionale de la basilique de saint Martin.

Il y eut cette année en Espagne une grande persécution des Chrétiens ; plusieurs furent envoyés en exil, privés de leurs biens, épuisés par la faim, enfermés dans les prisons, battus de verges et mis à mort par divers supplices. Ces crimes étaient dirigés surtout par Gonsuinthe[1], que le roi Leuvigild avait épousée après la mort d’Athanagild. Mais la vengeance divine, sur ceux qui avaient infligé ces humiliations aux serviteurs de Dieu, se manifesta aux yeux de tous les peuples ; car un nuage blanc se répandit sur un des yeux de Gonsuinthe, et priva ses paupières de la lumière qui manquait à son esprit. Le roi Leuvigild

  1. Mère de Brunehault