Page:Guizot - Sir Robert Peel, 1859.djvu/8

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le 28 juin 1850, la veille de l’accident qui a causé sa mort, sir Robert Peel, en rappelant la misérable querelle qui s’était émue, sept ans auparavant, entre la France et l’Angleterre, à propos des affaires de Taïti, m’avait fait l’honneur de parler de moi dans des termes dont je devais être et dont j’étais trop touché pour que ma sympathie parût tout à fait désintéressée. J’ajournai donc mon désir. J’y reviens aujourd’hui sans scrupule. Sir Robert Peel est entré dans l’histoire, et nulle part sa mémoire n’a plus de droits que dans cette enceinte[1]. Ce qui est l’étude de votre vie, Messieurs, était la pratique de la sienne. Des vérités que vous travaillez à répandre, il a fait des lois pour son pays./Vous voulez fonderies sciences politiques ; il les a fait pénétrer dans le gouvernement.

Non que sir Robert Peel fût un théoricien, un philosophe gouverné par des idées générales et des principes’ rationnels. C’était au contraire un esprit essentiellement pratique, consultant à chaque pas les faits comme le navigateur consulte l’état du ciel, cherchant surtout le succès, et prudent jusqu’à la circonspection. Mais s’il n’était pas le serviteur des principes, il n’en était pas non plus le détracteur ; il respectait la philosophie politique sans l’adorer, ne la croyant ni souveraine, ni vaine, et également étranger à la folle confiance de ceux qui prétendent régler toutes choses selon le vent qui souffle dans

  1. La première partie de cet essai a été lue à l’Académie des Sciences morales et politiques.