Page:Gustave Flaubert - Œuvres de jeunesse, III.djvu/274

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guère que le Charivari et le Tintamarre qui ne le fissent plus rire.

Il vit à la Bourse que la race des Turcarets n’est pas éteinte ; à l’École de médecine que pour être sans perruques les petits-fils de Diafoirus n’ont pas dégénéré ; au Palais, que les Brid’oison se rencontrent encore.

L’extérieur comique, en effet, a diminué, mais le fond semble avoir grandi en raison inverse ; cela est devenu plus difficile à saisir, plus complexe, plus délicat, plus intime. Soit, par exemple, l’idée d’un gouvernement constitutionnel : n’a-t-elle pas en elle-même quelque chose de tout à fait attique et d’essentiellement fait pour rire ? le système ou la pensée immuable, l’idée monarchique si vous aimez mieux, reparaissant continuellement sous les diverses figures de chaque ministère ne fait-elle pas involontairement penser à ces pièces à tiroir, où le même personnage vient tour à tour déguisé en paysan, en cocher de fiacre, en militaire, en cuisinier, faisant alternativement le doucereux, le terrible, l’ingénu, afin d’extorquer la dot de la pauvre fille ou de lui ravir son honneur ?

Il alla à l’Opéra ; il y vit des processions, des croix, des autels, y entendit jouer de l’orgue et chanter des psaumes. Il alla dans les églises ; on y exécutait des contredanses, et les mêmes gens qu’il avait vus la veille au soir sur la scène, habillés en prêtres ou en moines, chantant alors avec une expression appropriée à leur costume, étaient encore là qui continuaient leur métier, mais, maintenant, l’air sémillant et gaillard, frisés en papillotes, gantés de blanc, avec des manchettes et une chaîne d’or. En revanche il retrouvait le soir, à dîner en ville, ceux qu’il avait vus le matin desservant la messe en habits pontificaux, qui buvaient et mangeaient de bon appétit, causaient avec les dames et faisaient les agréables.