Voilà la Bonne Déesse, l’Idéenne des montagnes ; la Grand’mère de Syrie ! Approchez, braves gens ! elle est assise entre deux lions, porte sur la tête une couronne de tours, et procure beaucoup de biens à tous ceux qui la voient.
Nous la promenons dans les campagnes à l’ardeur du soleil, aux pluies d’hiver, dans les orages, par beau et mauvais temps ; elle enfonce ses pieds dans le sable lourd des rivages, elle gravit les défilés, elle glisse sur les pelouses, elle traverse les ruisseaux. Souvent, faute de gîte, nous couchons en plein air et nous n’avons pas tous les jours de table bien servie ; les voleurs habitent les bois, les bêtes féroces hurlent effroyablement dans leurs cavernes, il y a des chemins impraticables et pleins de précipices. La voilà ! la voilà !
Plus haute que les cèdres elle plane dans l’éther bleu ; plus vaste que le vent elle entoure la terre ; son cœur est placé au sein du monde, où bouillonnent les sources chaudes, où fermentent les métaux, où les racines vont puiser la vie ; son souffle s’échappe par les naseaux des panthères, par la feuille des plantes, par la sueur des corps et il se balance au crépuscule dans le brouillard violet, entre les gorges des collines ; ses pleurs d’argent arrosent les prairies, son sourire est la lumière, et c’est le lait de sa poitrine qui a blanchi la lune. Elle fait couler les fontaines, elle fait pousser la barbe, elle fait craquer l’écorce des pins qui remuent tout seuls dans les forêts. Donnez-lui quelque chose, car elle déteste les avares !