Page:Guyau - L’Irréligion de l’avenir.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
ii
introduction.


que nous fait connaître l’expérience, mais avec des êtres de pensée dont il peuple le monde.

Que toute religion soit ainsi l’établissement d’un lien, d’abord mythique, plus tard mystique, rattachant l’homme aux forces de l’univers, puis à l’univers même, enfin au principe de l’univers, — c’est ce qui ressort de toutes les études religieuses ; mais, ce que nous voulons mettre en lumière, c’est la façon précise dont ce lien a été conçu. Or, on le verra mieux à la fin de cette recherche, le lien religieux a été conçu ex analogia societatis humanœ : on a d’abord étendu les relations des hommes entre eux, tantôt amis, tantôt ennemis, à l’explication des faits physiques et des forces naturelles, puis à l’explication métaphysique du monde, de sa production, de sa conservation, de son gouvernement ; enfin on a universalisé les lois sociologiques et on s’est représenté l’état de paix ou de guerre qui règne entre les hommes, entre les familles, les tribus, les nations, comme existant aussi entre les volontés qu’on plaçait sous les forces naturelles ou au delà de ces forces. Une sociologie mythique ou mystique, conçue comme contenant le secret de toutes choses, tel est, selon nous, le fond de toutes les religions. Celles-ci ne sont pas seulement de l’anthropomorphisme, d’autant plus que les animaux et les êtres fantastiques ont joué un rôle considérable dans les religions ; elles sont une extension universelle et imaginative de toutes les relations bonnes ou mauvaises qui peuvent exister entre des volontés, de tous les rapports sociaux de guerre ou de paix, de haine ou d’amitié, d’obéis-