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LE TEMPS ET LA MÉMOIRE

dons une phrase, dit aussi M. Ribot, au cinquième mot, par exemple, il reste quelque chose du quatrième. Chaque état de conscience ne s’efface que progressivement : il laisse un prolongement analogue à ce que l’optique physiologique appelle une image consécutive (et mieux encore dans d’autres langues : after-sensation, Nachempfindung). Par ce fait, le quatrième et le cinquième mot sont en continuité, la fin de l’un touche le commencement de l’autre. C’est là, pour M. Ribot comme pour M. Taine, le point capital. Il y a une contiguïté, non pas indéterminée, consistant en ce que deux bouts quelconques se touchent, mais en ce que « le bout initial » de l’état actuel touche « le bout final de l’état antérieur ». Si ce simple fait est bien compris, le mécanisme théorique de la localisation dans le temps l’est du même coup, selon M. Ribot, car le passage régressif peut se faire également du quatrième mot au troisième et ainsi de suite, et chaque état de conscience ayant sa quantité de durée,. « le nombre des états de conscience ainsi parcourus régressivement et leur quantité de durée donnent la position d’un état quelconque par rapport au présent, son éloignement dans le temps ». Tel est le mécanisme théorique de la localisation : « une marche régressive qui,