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GENÈSE DE L’IDÉE DE TEMPS

M. Ribot compare les points de repère aux bornes kilométriques, aux poteaux indicateurs placés sur des routes, qui, partant d’un même point, divergent dans différentes directions. « Il y a toutefois, ajoute-t-il, cette particularité que ces séries peuvent en quelque sorte se juxtaposer pour se comparer entre elles. » — Mais, demanderons-nous, d’où vient cette possibilité de juxtaposer des durées, alors que la juxtaposition véritable est possible seulement pour l’espace ? De ce qu’en réalité, en croyant juxtaposer directement des durées, nous juxtaposons réellement des images spatiales, des perspectives spatiales. Nous prenons des années de notre vie, des périodes d’années, et chaque année est représentée par une révolution visible du soleil subdivisée en parties, où nous intercalons les principales scènes visibles de notre vie de l’année.

Les points de repère permettent de simplifier le mécanisme de la localisation dans le temps. L’événement qui sert comme point de repère revient très souvent dans la conscience ; il est très souvent comparé au présent quant à sa position dans le temps, c’est-à-dire que les états intermédiaires qui l’en séparent sont éveillés plus ou moins nettement. Il en résulte, selon MM. Taine et Ribot, que la