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ou les scandales de la renommée, non par timidité, mais par un juste sentiment de son importance et de sa dignité…

» Ce calme et cette sérénité, qui procèdent, non de l’indifférence, mais de la réserve, constituent l’originalité du caractère du Journal des Savants à presque toutes les époques de son existence. Les grandeurs et les désastres du règne de Louis XIV n’y laissent aucune trace ; à le lire pendant le xviiie siècle, on ne se douterait pas de tout le bruit qui se faisait autour de Voltaire, de Rousseau et des Encyclopédistes ; s’il paraît céder un moment aux entraînements des idées révolutionnaires, c’est avec une naïveté qui trahit son inexpérience des affaires publiques ; dans les cahiers de juillet 1830, de février ou de juin 1848, on ne pourrait saisir aucun écho, même affaibli, du tumulte sanglant de la rue ; rien non plus n’y rappelle les discussions animées qui, de 1820 à 1830, ont jeté le trouble dans la république des lettres. Ce journal est un sanctuaire à la porte duquel viennent mourir le fracas des émeutes et se calmer les emportements des querelles littéraires.

» Tel est le secret de la longue durée du Journal des Savants ; telle est en même temps, il faut bien le dire, l’explication de son succès restreint. Le gros du public veut qu’on l’amuse et surtout qu’on le flatte ; mais le Journal des Savants, où l’agré-