Page:Hatin - Histoire politique et littéraire de la presse en France, tome 2.djvu/419

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la plus incontestable n’a pas un langage plus décent ni plus persuasif.

» La haine de Voltaire et des Encyclopédistes est honteuse. Ils étaient sans contredit les plus forts par le nombre et par le talent, et toutefois, tous leurs efforts, toutes leurs intrigues, n’avaient qu’un but, celui d’accabler Fréron sous le poids de la force brutale. On ne voit pas qu’il y en ait un seul qui daigne raisonner avec lui… Et pourtant ce Fréron traqué par eux comme une bête fauve opposait à toutes les injures la patience d’un Socrate, discutait avec un admirable sang-froid le mérite littéraire des pamphlets où ils travaillaient à le déshonorer ; et, peu sensible à l’accusation d’ignorance qu’ils portaient contre lui, il s’attachait à les convaincre qu’en fait de bon goût, de tenue et de savoir-vivre, il était plus riche à lui seul, quand il le voulait, que tout leur bataillon réuni. Il est vrai que ses mœurs étaient détestables, et que les gens les plus touchés de son esprit se montraient difficiles sur les rapports avec sa personne. Mais, outre que les vices de Fréron étaient ceux de son temps, et que l’espèce de ministère public dont il était revêtu leur donnait des proportions qu’ils n’eussent pas eues dans un simple particulier, il valait apparemment mieux que sa réputation, et quand, par hasard ou autrement, on était mis en contact avec lui, la répulsion dont il avait été l’objet s’évanouissait tout-