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c’est sans doute une espèce d’injustice ; mais ses critiques n’en sont pas moins fondées… Il est malheureux que les circonstances l’aient obligé à perdre tant de temps à dire du mal des autres et à se défendre ensuite contre les ennemis qu’il se faisait tous les jours en exerçant un si triste métier. » (Édit. Tachereau, t. x, p. 184.)

Le célèbre critique nous a laissé, dans le Mercure, sur cette profession de journaliste, pour laquelle il était si bien fait, quelques pages qui m’ont semblé bonnes à conserver.

Voltaire, dont on connaît les bontés pour La Harpe, qu’il honora de sa collaboration dans le Mercure, et ensuite dans le Journal de Bruxelles, lui avait écrit de Ferney, à la date du 19 avril 1772, une lettre on ne peut plus élogieuse.


Vous prêtez, lui disait-il, de belles ailes à ce Mercure, qui n’était pas même galant du temps de Visé, et qui devient, grâce à vos soins, un monument de goût, de raison et de génie. Votre dissertation sur l’ode me paraît un des meilleurs ouvrages que nous ayons. Vous donnez le précepte et l’exemple. C’est ce que j’avais conseillé, il y a longtemps, aux journalistes[1] ; mais peut-on conseiller d’avoir du talent ?… Vous soutenez votre rôle bien

  1. On trouve, en effet, dans les œuvres de Voltaire, sous le titre de Conseils à un journaliste sur la philosophie, l’histoire, le théâtre, les pièces de poésie, les mélanges de littérature, les anecdotes littéraires, les langues, le style (édition Beuchot, t. xxxvii, p. 358 et suiv.), d’excellentes pages, qui avaient paru dans le Mercure de novembre 1744, et que nous regrettons de ne pouvoir reproduire. « Vous me demandez, dit-il en entrant en matière, comment il faut vous y prendre pour faire un journal qui plaise à notre siècle et à la postérité. Je vous répondrai en deux mots : Soyez impartial. Vous avez la science et le goût ; si, avec cela, vous êtes juste, je vous prédis un succès durable. »