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d’œil, il fendit l’espace à moitié chemin des nuages, en soufflant de colère. Il frissonnait, non de crainte, mais d’horreur, devant ces trois têtes au souffle empoisonné.

Quant à la Chimère, elle se dressa sur l’extrémité de sa queue, brandissant ses ongles, et lançant à ses deux adversaires des jets flamboyants. Grands dieux ! quels mugissements, féroces ! quels sifflement aigus !

Cependant Bellérophon affermit son bouclier à son bras et tira son glaive…

« À présent, mon bien-aimé Pégase, murmura-t-il à l’oreille de sa monture, il faut que tu m’aides à mettre fin à tant d’horreurs, ou tu vas retourner seul au sommet de ta montagne favorite ; car, ou la Chimère succombera, ou je laisserai ma tête aux dents de ses horribles mâchoires, ma tête qui s’est si souvent déjà reposée près de la tienne ! »

L’animal fidèle fit entendre un gémissement. Il se retourna et caressa de ses naseaux la joue de son cavalier : il voulait ainsi lui exprimer qu’il préférait perdre ses ailes et son immortalité, si toutefois l’immortalité pouvait être perdue, plutôt que de lui refuser son concours.

« Merci, Pégase ! s’écria Bellérophon ; et maintenant, droit au monstre !… »

En prononçant ces mots, il touche la bride. Pégase se précipite avec la promptitude d’une flèche