Page:Helvétius - Œuvres complètes d’Helvétius, tome 5.djvu/219

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les meilleurs juges dans le genre même où ils ont eu le plus de succès. Quelle est, me dira-t-on, la cause de ce phénomene littéraire ? C’est, répondrai-je, qu’il en est des grands écrivains comme des grands peintres ; chacun d’eux a sa maniere. M. de Crébillon, par exemple, exprimera quelquefois ses idées avec une force, une chaleur, une énergie, qui lui sont propres ; M. de Fontenelle les présentera avec un ordre, une netteté, et un tour, qui lui sont particuliers ; et M. de Voltaire les rendra avec une imagination, une noblesse et une élégance continues.

Or chacun de ces hommes illustres, nécessité par son goût à regarder sa maniere comme la meilleure, doit en conséquence faire souvent plus de cas de l’homme médiocre qui la saisit que de l’homme de génie qui s’en fait une. De là les jugements différents