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ment et refusa même le commandement général de toutes les forces du royaume, dans la crainte d’exciter la jalousie des barons anglais. Le comté de Richemond, divers autres fiefs et terres qui le mirent au rang des puissants feudataires de l’Angleterre, lui furent concédés par Henri III, dont il ne voulut point recevoir d’autres faveurs.

En Savoie, son modeste apanage se grossit successivement de l’héritage de ses frères et des nombreuses terres et seigneuries qu’il acquit dans la Suisse romande. Voulant s’attacher cette dernière contrée, qu’il venait d’acquérir pièce par pièce par des moyens très divers, il y développa le commerce, la dota de libertés publiques et de lois si sages, que le souvenir de ses grandes qualités s’est perpétué jusqu’à nos jours dans le cœur des Vaudois. Aussi est-il appelé le conquérant et le législateur du pays de Vaud, et la postérité lui a décerné le nom de Petit Charlemagne.

Lorsqu’en 1263, à la mort de Boniface, fils d’Amédée IV, il hérita du comté de Savoie, son autorité était celle d’un grand souverain. Aux possessions que nous venons d’indiquer, il faut encore ajouter le Faucigny, que lui avait apporté en dot sa femme Agnès, fille d’Aymon II, seigneur de Faucigny, en 1253[1].

Par un rare bonheur et une grande habileté, il sut posséder une baronnie importante en Angleterre et un comté fort étendu dans les Alpes. Il visitait alternativement ces

  1. De cette union naquit une seule fille, Béatrix, qui s’allia à Guy VII dauphin de Viennois, le 3 décembre 1241, dans le château de Chillon, où avait eu lieu, dix-huit ans auparavant, le mariage de ses parents. Agnès, ayant survécu à son mari Pierre II, resta maîtresse du Faucigny et le transmit en dot à sa fille Béatrix, devenue dauphine de Viennois et appelée la grande dauphine. De là, une guerre longue et sanglante entre les comtes de Savoie et les dauphins, qui ne se termina que par la cession du Dauphiné à la France en 1355.