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devant ledit château. Et en allant sur ledit échafaud, Monseigneur le duc tenait Monseigneur par la main ; en retournant, Monseigneur lui dit que ceux de dedans ne l’avaient point vu.

« Le bon seigneur duc dit à ceux qui portaient ledit Saint-Suaire, qu’ils le montrassent en l’église dessus l’autel. Ce qui fut fait, et est la chose la plus digne et la plus piteuse que je vis jamais, et n’est pas chrétien à mon avis qui en la voyant n’a crainte en soi et plus n’en dis.

« Ce dit jour partîmes et vînmes passer par le Bourget, puis commençâmes à monter le Mont-du-Chat, le pire chemin qui fut oncques, par monts et vallées jusques dessus l’abbaye d’Hautecombe, et au descendre y eut un terrible tintamarre, car il n’y avait gens ni bêtes qui en pussent venir à bout. Toutefois nous vînmes en bas et trouvâmes le couvent qui reçut Monseigneur comme leur père abbé.

« Ledit monastère est assis sur le bord d’un lac, et, d’autre côté, le roc y est bien fort. Somme, la situation est terrible, combien qu’il ne laisse pas à être bon de rentes au commendataire.

« Incontinent, nous fumes déshabillés et subitement Monseigneur tint chapitre et visita les sacrements et autres lieux.

« Le jour de Pâques, Monseigneur fit le service, fut diné en couvent et ne mangeait ne ses religieux aussi, sinon comme à Clairvaux, combien que les religieux dudit monastère mangeassent de chair, de quoi mondit seigneur fut fort marry. Il y avait audit monastère xxxiiii religieux, tous peu savants et assez ingrats à ce que j’en su connaître. Et cedit jour, après dîner, Monseigneur mena le couvent jouer et voir une fontaine nommée la Fontaine des Merveilles.

« Le second, il tint chapitre, et lit lire sa chartre, puis