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La résistance du Sénat avait donc abouti à un compromis honorable ; le prince aurait un rang privilégié au milieu de ses collègues, mais il n’administrerait la justice qu’après avoir fourni les preuves de sa capacité. C’était là le point essentiel et sur lequel la noble Cour de justice ne transigeait pas. Voilà comment l’indépendance de la magistrature était comprise et défendue dans cette province où régnait le respect des lois et des traditions et où le pouvoir central ne pouvait renverser, d’un trait de plume, des prérogatives anciennes. Il y a loin de là à l’omnipotence actuelle d’un chef d’État ou d’une assemblée souveraine dont la volonté peut arbitrairement faire table rase des droits et des immunités les mieux fondées.

Sous la prélature de dom Antoine, l’abbaye d’Hautecombe fut menacée de perdre la léproserie de la Guillotière. Cette maison de charité n’était plus administrée par les moines d’Hautecombe depuis de longues années[1], mais par des laïques à qui l’abbé commendataire l’affermait. Sous le régime de la commende, tout aboutissait à des questions de finances, et cet établissement figurait, dans l’état des propriétés et des charges de l’abbaye, comme un capital produisant 16 livres viennoises. Il avait été albergé à ce prix, en 1627, par Adrien de Saluces ; et, en 1673, c’était un « bouchier de Lyon » nommé Jean Chady qui payait cette rente. Voici comment Hautecombe faillit en être dépouillée :

  1. « La Magdeleine et vignettes est un fonds situé à Lion au faubourg de la Guillotière albergée cy devant par le sieur Delbene abbé d’Hautecombe, au sieur de Mornieu du dit Lion qui n’en paye aucune censé pour avoir este saisie par messieurs du chapitre de Saint-Just pour des censés à eux deùbes sur le dit fonds. (Estat sommaire au cray des revenus de l’abbaye d’Hautecombe, publié dans la Revue savois., 1868, p. 27.)