Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/101

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L’une et l’autre se nomment injustes ; de sorte que le mot d’injure signifie la même chose qu’une action ou une omission injuste, et toutes deux emportent une infraction de quelque accord. En effet, il semble que ce nom d’injure a été donné chez les Latins à cette sorte d’ac­tion ou d’omission, à cause qu’elle est faite sine jure, hors de tout droit, dont le transport avait été fait à autrui par celui qui fait, ou qui manque à faire quelque chose. Il y a beaucoup de rapport, à mon avis, entre ce qu’on tient pour injure dans le cours de la vie, et ce qu’on nomme absurde dans l’École. Car de même qu’on dit, que celui qui est contraint par la force des démonstrations de nier une assertion, qu’il avait auparavant soutenue, est réduit à l’absurde ; celui aussi, qui, par une faiblesse d’esprit, fait, ou laisse à faire une chose qu’il avait promise tout autrement dans son contrat, commet une injure, et ne tombe pas moins que l’autre en cette espèce de contradic­tion, que l’École a nommée absurdité. Car, en accordant qu’une telle action sortira à effet, il a voulu qu’elle se fit : et en ne la faisant pas, il témoigne qu’il veut tout le contraire ; ce qui est vouloir, et ne pas vouloir en même temps, contradiction honteuse et manifeste. Je dirais donc volontiers, que l’injure est une certaine absurdité qui se commet en la conversation ; tout ainsi que l’absurdité est une espèce d’injure qui se fait en la dispute.