Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/171

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la personne du roi. Ce qui donne lieu aux objections suivantes qu’ils forment contre la puissance absolue. Premièrement ils disent que, si quelqu’un avait cette autorité, la condition des sujets serait très misérable ; car ils pensent qu’il ravi­rait, pillerait, tuerait, et s’imaginent qu’ils sentent déjà ces extorsions et ces violences. Mais, d’où leur viennent ces appréhensions ? qui obligerait le souverain à en user de la sorte ? Ce ne serait pas sa puissance ; car elle ne serait rien sans la volonté. Mais voudrait-il bien ruiner tout le peuple pour enrichir quelques favoris ? Certainement il le pourrait sans faire tort à personne, quoique ce ne fût pas injustement, ni sans violer les lois de nature, et offenser Dieu : aussi pour empêcher cette pratique, les peuples font prêter serment aux princes, comme pour s’assurer d’eux en quelque sorte. Mais, encore que le souverain peut avec justice, ou en méprisant son serment, en user ainsi ; toutefois je ne vois point quel dessein il aurait en ruinant les sujets, vu que cela retomberait sur lui-même, et empirerait sa condition propre. J’avoue qu’il se peut rencontrer des princes de mauvais naturel. Mais je veux qu’on ne donne à un tel qu’une puissance limitée, et autant qu’il lui en faut pour la défense de ses sujets, ce que l’intérêt de chaque particulier demande qu’on lui accorde : n’y aura-t-il pas ensuite les mêmes inconvénients à craindre ? Car, celui qui aura assez de force