que de s’abstenir quelquefois d’user de leur puissance et de permettre certaines choses, sans pourtant relâcher de leur droit. »
XIV. On ne peut pas se donner quelque chose à soi-même, parce qu’il est à présupposer qu’on la possède avant qu’on se la donne. On ne peut point aussi se faire plaisir à soi-même ; car en ce cas-là, celui qui obligerait et celui qui demeurerait obligé, étant une même personne, et l’un pouvant être délivré par l’autre de son obligation, ce serait en vain qu’on se serait obligé soi-même ; pour ce qu’on se ferait quitte quand on voudrait, et celui qui a cette puissance de se délivrer, est de là effectivement libre. D’où il appert, qu’une cité n’est point sujette aux lois civiles ; car les lois civiles sont les ordonnances de la ville, auxquelles si elle était liée, elle serait obligée à soi-même. De même, la ville ne peut pas s’obliger à un de ses bourgeois ; car il peut la délivrer de son obligation quand il lui plaira ; or est-il qu’il le veut toutes fois et quantes que la ville le désire : (car la volonté des particuliers est comprise dans la volonté du public) donc la ville est dégagée quand il lui plaît de l’être ; et par conséquent elle est déjà effectivement libre. Or la volonté de cet homme, ou de ce conseil, qui a la puissance souveraine, est tenue pour la volonté de toute la ville, et celle-ci enferme les volontés de tous les particuliers. D’où je conclus que le souverain n’est point attaché aux lois civiles (