Page:Hobbes - Œuvres philosophiques et politiques (trad. Sorbière), 1787.djvu/357

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nous ne dirons point aussi que nous en concevions l’essence, que notre imagination s’en forme d’idée, ou qu’aucune faculté de notre âme soit capable de se le présenter ; car il serait fini s’il était de notre portée, et si par nos faibles efforts il nous était permis d’atteindre à une hauteur tout à fait inaccessible. Et bien que ce terme d’infini marque une conception de notre esprit, il ne s’ensuit pas que notre entendement forme aucune pensée propre à exprimer une chose infinie. En effet, lorsque nous disons qu’une chose est infinie, nous ne signifions rien en ce qui est de la chose en elle-même, mais nous témoignons l’impuissance de notre âme, et c’est le même que si nous avouions franchement que nous ne savons si cette chose-là est finie, ni où c’est qu’elle rencontre ses limites. Et c’est parler de Dieu avec fort peu de respect, que de dire que nous en ayons l’idée dans l’âme ; car l’idée n’est autre chose que notre concep­tion, et nous ne sommes capables de concevoir que des choses finies. Il se faudra bien garder aussi de dire que Dieu soit composé de parties, ou qu’il soit un Tout, parce que ces façons de parler sont des attributs qu’on donne à des choses finies ; ni qu’il est en quelque lieu, car, rien ne peut occuper un lieu qui ne reçoive de tous côtés des bornes de sa grandeur, ni qu’il se meut ou qu’il se repose, d’autant qu’en l’un et en l’autre on supposerait qu’il est dans un lieu, et qu’il occupe quelque espace,