Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/128

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il mourut au moment où il venait de réussir à me faire entrer comme apprenti chez un orfèvre. Ma mère parlait beaucoup de vous, elle voulait vous exposer sa situation, ses malheurs ; mais elle se laissait dominer ensuite par le découragement qu’engendre la misère. Cela, et peut-être aussi cette fausse honte qui aigrit souvent les esprits mortellement blessés, l’empêcha d’exécuter son projet. Peu de mois après la mort de mon père, ma mère le suivit dans le tombeau. »

« Ma chère Anne ! ma pauvre Anne ! » s’écria mademoiselle de Scudéry douloureusement émue. — Olivier reprit d’une voix forte, en jetant vers le ciel un regard sombre et farouche : — « Grâce et merci à la Providence éternelle, de ce qu’elle n’est plus, pour voir son fils bien-aimé tomber honteusement flétri sous la main du bourreau ! »

Une agitation inquiète se manifesta au-dehors, on allait et venait de tous côtés. « Hoho ! dit Olivier avec un sourire amer, Desgrais donne l’éveil à ses gens, comme si je pouvais songer ici à m’échapper. — Mais continuons : — J’étais traité durement chez mon maître, quoique je n’eusse guère tardé à mieux faire que les autres compagnons, et que bientôt enfin je fusse devenu beaucoup plus habile que le patron lui-même. Un jour, un étranger arriva dans l’atelier pour faire emplette de quelques bijoux. Lorsqu’il vit un joli collier que j’avais fabriqué, il me frappa sur l’épaule d’un air amical, et il dit en contemplant la parure : “Héhé ! mon jeune ami, mais voilà un travail superbe ; et je ne sais pas, en