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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/15

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de m’emporter comme un grossier personnage, et d’offenser quelqu’un par une impolitesse non moins commune que gratuite ? » — Le baron en vint à se persuader que cet homme, en l’envisageant ainsi, n’avait cédé qu’à la sensation horriblement pénible du contraste choquant qu’il supposait l’avoir frappé, au moment où il luttait peut-être contre les angoisses du besoin, tandis qu’il voyait le baron, livré à un jeu insolent, entasser tant d’or devant lui. Il résolut de chercher à son lever l’étranger et de lui faire réparation.

Le hasard fit précisément que la première personne que Siegfried rencontra sur la promenade fut l’étranger.

Le baron l’aborda, s’excusa énergiquement de sa conduite de la nuit passée, et conclut par demander formellement pardon à l’étranger. Celui-ci dit qu’il ne reconnaissait au baron aucun tort, qu’il fallait pardonner beaucoup de choses au joueur dans la chaleur du jeu ; mais que du reste, il avait lui-même provoqué l’apostrophe en question par son opiniâtreté à garder une place où il devait gêner le baron.

Le baron alla plus loin, il dit qu’il y avait souvent dans la vie des embarras momentanés qui portaient le coup le plus sensible à l’homme bien élevé ; bref, il donna à entendre à l’étranger qu’il mettrait volontiers à sa disposition la somme qu’il avait gagnée, et plus s’il le fallait pour lui rendre service.

« Monsieur, répliqua l’étranger, vous me croyez dans le besoin : je n’y suis pas précisément ; car,