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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/201

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surpassait toutes les prévisions imaginables. — Le comte s’efforça, autant qu’il put, de consoler son épouse, quoiqu’il se sentit pénétré lui-même d’un mortel frisson de terreur. Redevenu plus calme, il fut obligé de s’avouer encore que, bien que la baronne fût morte, la profonde abjection de sa vie jetait sur sa propre destinée un sombre et lugubre reflet. Déjà la réalité de cette influence sinistre lui semblait évidente et palpable.

Peu de temps après, un grave changement se manifesta dans l’état d’Aurélia. Ses yeux éteints, sa pâleur livide semblaient des symptômes d’une maladie particulière, tandis que l’agitation et le trouble mêlé de stupeur de son esprit laissaient pressentir qu’un nouveau secret était la cause de son anxiété et de ses souffrances. Elle fuyait même la présence de son mari, tantôt s’enfermant dans sa chambre des heures entières, tantôt cherchant la solitude dans les endroits du parc les plus écartés. À son retour, la rougeur de ses yeux témoignait des pleurs répandus, et, dans l’altération de tous ses traits, on devinait qu’elle avait eu à lutter contre d’affreuse angoisses.

Le comte chercha vainement à découvrir le véritable motif de ce funeste dérangement. À la fin il tomba dans un morne découragement, et les conjectures d’un médecin célèbre qu’il avait mandé, ne parvinrent pas à le consoler. Celui-ci attribuait au changement de position de la comtesse, c’est-à-dire à son mariage, cette surexcitation de sensibilité et les visions menaçantes dont elle était poursuivie,