Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/205

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la lecture qu’il avait coutume de faire dans son lit, et, quand minuit vint, il n’éprouva point, comme à l’ordinaire, l’espèce de léthargie qui le surprenait à cette heure; cependant il feignit de s’assoupir, et parut bientôt après comme profondément endormi. Alors la comtesse se glissa doucement hors de son lit, elle s’approcha de celui du comte, et, après avoir passé une lumière devant son visage, elle sortit de la chambre avec précaution.

Le cœur d’Hypolite battait violemment ; il se leva, jeta un manteau sur ses épaules, et s’élança sur la trace de sa femme, qui déjà l’avait devancé de beaucoup. Mais la lune brillait dans son plein, et il put aisément distinguer de loin Aurélia, enveloppée d’un négligé de nuit blanc. Elle traversa le parc, se dirigeant vers le cimetière, et près du mur qui lui servait d’enceinte elle disparut. Le comte arrive au même endroit, et devant lui, à quelques pas de distance, il voit aux rayons de la lune un cercle effroyable de fantômes ou de vieilles femmes à demi-nues, échevelées et accroupies par terre, autour du cadavre d’un homme dont elles se disputent les lambeaux de chair qu’elles dévorent avec une avidité de vautours. — Aurélia est au milieu d’elles!...

Le comte s’enfuit en courant au hasard, saisi d’une horreur inouïe, stupéfait, glacé par un frisson mortel, et se croyant poursuivi par les furies de l’enfer. À la pointe du jour, et baigné de sueur, il se retrouva à l’entrée du château. Involontairement, et maître à peine de ses idées, il monte rapidement l’escalier