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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/263

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grattement s’était fait entendre. Je crus même en ce moment y distinguer des taches de sang ! Mademoiselle Adelheid, qui n’avait pas quitté ma main, s’aperçut naturellement du frisson glacial qui m’avait saisi. « Qu’avez-vous donc ? qu’avez-vous donc ? me dit-elle tout bas, vous êtes plus froid que le marbre. Oh ! moi, je veux vous rappeler à la vie. Savez-vous bien que la baronne meurt d’impatience de vous voir ? Elle se tourmente déraisonnablement, et ne croira pas, à moins de votre présence, que l’odieux loup ne vous a pas mis en pièces. Eh ! mon cher ami, quel sort avez-vous jeté à la pauvre Séraphine ? jamais je ne l’ai vue ainsi ! — Hoho ! comme à présent le pouls recommence à battre : comme notre sang refroidi s’est vite enflammé de nouveau ! — Allons, venez-vous ? Bien doucement ! — Nous allons rejoindre la chère baronne ! »

Je me laissai entrainer sans répondre, car la manière dont Adelheid parlait de la baronne me semblait indigne, et l’idée d’une connivence entre elle et moi me répugnait à l’excès. J’entrai derrière Adelheid. Séraphine avança promptement de trois ou quatre pas en jetant une exclamation à demi-comprimée, et elle s’arrêta subitement au milieu de la chambre comme frappée d’une arrière-pensée. J’osai m’emparer de sa main et la porter à mes lèvres ; elle la laissa reposer dans la mienne, et dit : « Mais, mon Dieu, est-ce donc votre vocation d’aller chercher querelle aux loups ? Ne savez-vous pas bien que les temps fabuleux d’Orphée et d’Amphion sont passés sans retour, et que les bêtes sauvages ont perdu