Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/301

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dépensé la totalité des revenus annuels ; et puisqu’on n’avait trouvé parmi ses papiers qu’une valeur presque insignifiante en billets de banque, dépassant à peine la somme de mille écus en numéraire, que renfermait la caisse en fer du baron, il était positif que l’argent devait avoir été caché quelque autre part, et Daniel seul pouvait sans doute faire connaître la vérité. Mais non moins obstiné ni moins entier de caractère que son défunt maître, peut-être attendait-il pour s’expliquer qu’on l’en sollicitât.

Le baron appréhendait vivement que Daniel, après le traitement insultant dont il avait à se plaindre, n’aimât mieux laisser le trésor secret à jamais enfoui, que de le remettre à sa disposition ; non par cupidité, car à quoi pouvait servir la somme d’argent la plus importante à un vieillard dont la seule ambition était de finir ses jours dans le château de la famille, mais bien pour se venger de l’outrage qu’il avait reçu du baron. Celui raconta à V*** tous les détails de la scène avec Daniel, et dit, en finissant, qu’il avait lieu de croire, d’après maint renseignement, que Daniel seul avait suggéré au vieux baron son aversion inexplicable pour ses enfants, et la défense expresse qu’ils avaient reçue d’approcher du toit paternel. Le justicier refusa absolument d’admettre cette supposition ; car aucun être humain, dit-il, n’avait jamais été dans le cas d’influencer le moins du monde les résolutions du défunt, et bien moins encore de lui en imposer aucune. Il prit sur lui, du reste, de faire parler le vieux serviteur,