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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/319

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ainsi tombé dans le précipice. Mais cette explication était pourtant bien forcée ; car si le baron allait chercher un livre dans la bibliothèque pour lire, ne pouvant pas dormir, cela s’opposait précisément à ce qu’on pût le supposer assoupi ; et cependant comment admettre qu’autrement il aurait pu manquer la porte du cabinet et ouvrir l’autre à sa place ? Celle-ci d’ailleurs n’était-elle pas solidement fermée et impossible à ouvrir, sinon avec beaucoup de peines ?

V. finissait de développer devant tous les domestiques réunis cette série d’invraisemblances, quand Franz, le garde de confiance du baron, se prit à dire : « Ah ! monsieur le justicier ! ce n’est pas ainsi que l’événement est arrivé. — Et comment donc a-t-il eu lieu, en ce cas ? » dit V. d’un ton imposant. Le brave et honnête Franz, qui aurait volontiers suivi son maître dans le tombeau, ne voulut pas en dire davantage devant les autres serviteurs, se réservant de confier au justicier seul ce qu’il prétendait savoir.

V. apprit alors que le baron parlait souvent à Franz des immenses trésors qu’il croyait enfouis dans les décombres de la tour, et que maintes fois, poussé par un génie malfaisant, il allait ouvrir au milieu de la nuit la porte dont il avait exigé que Daniel lui remit la clef, pour s’enivrer, dans l’ardeur de sa convoitise, du spectacle imaginaire de ces richesses supposées. Dès lors il était hors de doute que dans cette nuit fatale, après le départ de Franz, le baron était allé contempler les ruines, et que là,