Aller au contenu

Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/359

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

toute particulière à la réalité, me frappa de l’impression la plus funeste.

— Peut-être, mon excellent père, dit Ottmar, fournirez-vous ainsi à mon ami Alban et à moi un précieux argument de plus à l’appui de la théorie, aujourd’hui bien établie, de l’influence magnétique, laquelle résulte d’observations multipliées sur le sommeil et les rêves.

— Rien que le mot de magnétisme m’irrite à l’excès, s’écria le baron en fronçant le sourcil, mais chacun a ses idées : tant mieux pour vous si la nature souffre patiemment que vos mains audacieuses tiraillent le voile qui la couvre, et ne vous fait pas expier par votre ruine votre folle curiosité. — Ne discutons pas, mon excellent père, sur des opinions dépendantes de la conviction la plus intime, répliqua Ottmar ; mais cette histoire de votre jeunesse ne peut-elle, s’il vous plait, se formuler en récit ? »

Le baron s’enfonça dans son fauteuil, et il parla ainsi, son regard expressif levé au ciel, comme c’était son habitude lorsqu’il était profondément ému :

« Vous savez que j’ai reçu mon éducation militaire au lycée noble de Berlin2. Parmi les maîtres qui y professaient, il se trouvait un homme que je ne saurais oublier de ma vie. À présent même, je ne puis penser à lui sans un frisson intérieur, je dirais presque sans effroi ; il me semble souvent qu’il va ouvrir la porte et paraître devant moi tel qu’un fantôme ! — Sa taille gigantesque ressortait encore davantage à cause de son extrême maigreur ; tout son