Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/365

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de mon lit, et j’ouvris les fenêtres pour laisser entrer l’air extérieur dans cette chambre brûlante. Mais quelle fut ma frayeur, lorsque je vis, à la clarté de la lune, le major dans son uniforme de parade, tel absolument qu’il m’était apparu dans mon rêve, se diriger, par la grande avenue, vers la grille qui donnait issue dans la campagne. Il l’ouvrit, et en repoussa les battants, après être sorti, si violemment, que les gonds et les verroux craquèrent avec fracas, et que le bruit résonna longtemps dans le calme de la nuit. — Qu’est-ce à dire ? que veut faire le major au milieu des champs à pareille heure ? pensai-je en moi-même. Et une anxiété inexprimable s’empara de moi. Comme entrainé par une force irrésistible, je m’habillai à la hâte, j’allai réveiller notre inspecteur, un bon vieillard de soixante et dix ans, le seul homme que le major craignit et ménageât, même dans ses plus violents paroxismes, et je lui racontai mon rêve, ainsi que ce qui s’était passé ensuite. Le vieillard m’écouta avec une extrême attention et me dit : ‹ Moi aussi, j’ai cru entendre fermer rudement la grille du jardin, mais j’ai cru que c’était une illusion, non sans penser toutefois qu’il pourrait bien être arrivé quelque chose d’extraordinaire au major, et qu’il serait à propos de visiter sa chambre. ›

» La cloche de la maison eut bientôt réveillé maîtres et élèves, et nous nous dirigeâmes avec des flambeaux, formant une sorte de procession solennelle, par le long corridor, vers l’appartement du major. La porte était fermée, et les vaines tentatives qu’