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Page:Hoffmann - Contes fantastiques,Tome 2, trad. Egmont, 1836.djvu/40

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de sa fortune perdue contre le chevalier.

Un jour, Angela, l’heureuse fiancée du chevalier de Ménars, était assise à la fenêtre plongée dans mille pensées d’amour, de plaisir et de joie, si naturels dans sa situation. Un régiment de chasseurs, partant pour la campagne d’Espagne, vint à passer devant elle au son joyeux des clairons. Angela considérait avec un sentiment de pitié ces hommes destinés à être victimes de cette guerre funeste, lorsqu’un tout jeune homme détournant vivement la bride de son cheval, jeta un regard sur Angela, qui retomba aussitôt sur sa chaise sans connaissance.

Hélas ! le chasseur qui marchait ainsi à une mort probable n’était autre que le jeune Duvernet, le fils d’un voisin, le compagnon assidu de son enfance, qui venait la voir presque chaque jour, et n’avait cessé de paraître dans la maison que depuis l’introduction du chevalier.

Dans le coup d’œil chargé de reproches du jeune homme on lisait son arrêt de mort. Angela reconnut alors pour la première fois non seulement à quel excès il l’avait aimée, mais qu’elle même, et à son insu, l’aimait aussi d’une façon inexprimable, et n’avait été qu’éblouie, fascinée par la séduction de plus en plus contagieuse attachée à la personne du chevalier. Elle comprit seulement alors les soupirs inquiets du jeune homme, ses attentions silencieuses et sans prétention ; ce ne fut qu’alors qu’elle comprit l’entraînement de son propre cœur, et les secrètes palpitations qui soulevaient son sein quand