Page:Huc - Le christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet, tome 2.djvu/82

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à bout de leurs mauvais desseins. Les persécutions de tout genre furent alors incessantes, et bientôt elles prirent un tel caractère de violence que la sécurité personnelle du P. Ricci fut sérieusement compromise. On ne se contentait plus de s’ameuter autour de l’établissement chrétien et de proférer des menaces et des insultes contre les diables occidentaux, on leur lançait des projectiles du haut de la tour, et souvent il arrivait que les pierres pleuvaient comme la grêle sur la maison.

Un jour, un enfant de Tchao-King s’acharnait à coups de pierres contre la porte de la chapelle ; un domestique sortit brusquement, saisit le drôle et l’entraîna dans la maison pour lui infliger une salutaire correction. Quelques voisins qui s’en aperçurent poussèrent aussitôt les hauts cris, la multitude s’amassa, la maison fut envahie, le jeune garçon enlevé et promené par la ville, au milieu des injures et des malédictions qu’on vomissait contre les Européens. Un lettré s’empara quelques jours après de cette aventure et en fit une grosse affaire. Il dressa un acte d’accusation contre le P. Ricci, auquel il reprochait d’avoir arrêté frauduleusement cet enfant, de l’avoir tenu au secret pendant trois jours, de lui avoir fait prendre un breuvage ensorcelé, afin de troubler ses facultés, et de l’envoyer en cet état à ses compatriotes de Macao pour le faire servir à des opérations magiques. Cet acte d’accusation fut envoyé au gouverneur, et il se rencontra une foule de faux témoins disposés à certifier devant les juges que ces assertions étaient conformes à la vérité. Cette affaire excita un affreux tumulte dans la ville. Le