Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/114

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On sait qu'au quatorzième siècle, du temps de la domination des empereurs mongols, il existait de fréquentes relations entre les Européens et les peuples de la Haute-Asie. Nous avons déjà parlé, dans la première partie de notre voyage, de ces ambassades célèbres que les conquérants tartares envoyèrent à Rome, en France et en Angleterre. Nul doute que ces Barbares durent être frappés de la pompe et de l'éclat des cérémonies du culte catholique, et qu'ils en emportèrent dans leur désert des souvenirs ineffaçables. D'autre part, on sait aussi qu'à la même époque, des religieux de différents ordres entreprirent des courses lointaines, pour introduire le christianisme dans la Tartarie ; ils durent pénétrer en même temps dans le Thibet, chez les Si-Fan, et les Mongols de la mer Bleue. Jean de Montcorvin, archevêque de Péking, avait déjà organisé un chœur, où de nombreux religieux mongols s'exerçaient tous les jours à la récitation des psaumes, et aux cérémonies catholiques. Maintenant, si on fait attention que Tsong-Kaba vivait précisément à la même époque où la religion chrétienne s'introduisait dans l'Asie centrale, on ne sera pas étonné de trouver, dans la réforme bouddhique, des rapports aussi frappants avec le christianisme.

Et ne pourrait-on pas dire encore quelque chose de plus positif ? Cette légende de Tsong-Kaba, que nous avons recueillie sur le lieu même de sa naissance, et de la bouche de plusieurs Lamas, ne pourrait-elle pas venir à l'appui de notre opinion ? Après avoir élagué tout le merveilleux qui a été ajouté à ce récit par l'imagination des Lamas, on peut admettre que Tsong-Kaba fut un homme au-dessus du commun par sou génie, et peut-être aussi par sa vertu ;