Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/246

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monde. Ce long et pénible voyage nous avait tellement rapprochés de l'état sauvage, que nous étions comme en extase devant tout ce qui tenait à la civilisation. Les maisons, les instruments aratoires, tout, jusqu'à un simple sillon, nous paraissait digne d'attirer notre attention. Ce qui nous frappa pourtant le plus, ce fut la prodigieuse élévation de température que nous remarquâmes au milieu de ces terres cultivées. Quoique nous fussions à la fin du mois de janvier, la rivière et les canaux étaient seulement bordés d'une légère couche de glace ; on ne rencontrait presque personne qui fût vêtu de pelleteries.

A Pampou, notre caravane fut obligée de se tranformer encore une fois. Ordinairement, les bœufs à long poil ne vont pas plus loin ; ils sont remplacés par des ânes extrêmement petits, mais robustes, et accoutumés à porter des fardeaux. La difficulté de trouver un assez grand nombre d'ânes pour les bagages des Lamas de Kcharthin et les nôtres, nous contraignit de séjourner à Pampou pendant deux jours. Nous utilisâmes ce temps en essayant de mettre un peu d'ordre dans notre toilette. Nous avions la chevelure et la barbe si hérissées, la figure si noircie par la fumée de la tente, si crevassée par le froid, si maigre, si décomposée, que nous eûmes pitié de nous-mêmes, quand nous pûmes considérer notre image dans un miroir. Pour ce qui est de notre costume, il était parfaitement assorti à notre personne.

Les habitants de Pampou vivent, en général, dans une grand aisance ; aussi sont-ils continuellement gais et sans souci. Tous les soirs, ils se réunissent devant les fermes, et on les voit, hommes, femmes et enfants, sautiller en