Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome X.djvu/213

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GALLUS.

Qui contient un poison. Un remède infaillible.

GUNICH.

Eh bien ?

GALLUS.

Eh bien ? Je ne l’ai plus.

GUNICH.

Eh bien ? Je ne l’ai plus. Comment ?

GALLUS.

Eh bien ? Je ne l’ai plus. Comment ? On me l’a pris
Pendant que je dormais ou bien que j’étais gris.
Je le regrette.

GUNICH.

Je le regrette. Au fait, c’était un joyau rare.

GALLUS.

Un ami. Cet anneau me venait de Ferrare
Dont une Borgia fut duchesse. On vieillit,
Tu comprends ; le destin devient un mauvais lit ;
Un vieux beau, c’est un être absurde et difficile,
D’un côté sensitive et de l’autre fossile.
On sort de l’opéra, du bal, de chez Mesmer,
De chez le roi de France, avec le mal de mer.
C’est pour cela, dût-on n’en jamais faire usage,
Qu’on tient à ces bijoux sinistres, et qu’un sage,
À tous les biens qu’il a, qu’il attend, qu’on lui doit,
Qu’il espère ou qu’il veut, joint la mort, bague au doigt.

GUNICH.

Un suicide en l’air, facultatif, possible,
Départ à volonté pour le monde invisible,
Avoir toujours la clef du tombeau sous sa main,
Faire, comme un valet, venir ce noir Demain,
Avoir derrière soi l’éternité qu’on sonne