Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 3.djvu/123

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matelots et cochers ; dans l’opinion de maître Nicless, connaisseur en canaille, il y avait maintenant dans cette populace des gentilshommes et des baronnets, déguisés en gens du peuple. Le déguisement est un des bonheurs de l’orgueil, et c’était la grande mode d’alors. Cette aristocratie mêlée à la mob était bon signe et indiquait une extension de succès gagnant Londres. La gloire de Gwynplaine avait décidément fait son entrée dans le grand public. Et le fait était réel. Il n’était plus question dans Londres que de l’Homme qui Rit. On en parlait jusque chez le Mohock-Club, hanté des lords.

Dans la Green-Box on ne s’en doutait pas ; on se contentait d’être heureux. L’enivrement de Dea, c’était de toucher tous les soirs le front crépu et fauve de Gwynplaine. En amour, rien n’est tel qu’une habitude. Toute la vie s’y concentre. La réapparition de l’astre est une habitude de l’univers. La création n’est pas autre chose qu’une amoureuse, et le soleil est un amant.