Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 3.djvu/131

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Il allait devant lui, délicieusement hagard. Les parfums errants de la sève en travail, les irradiations capiteuses qui flottent dans l’ombre, l’ouverture lointaine des fleurs nocturnes, la complicité des petits nids cachés, les bruissements d’eaux et de feuilles, les soupirs sortant des choses, la fraîcheur, la tiédeur, tout ce mystérieux éveil d’avril et de mai, c’est l’immense sexe épars proposant à voix basse la volupté, provocation vertigineuse qui fait bégayer l’âme. L’idéal ne sait plus ce qu’il dit.

Qui eût vu marcher Gwynplaine eût pensé : Tiens ! un ivrogne !

Il chancelait presque en effet sous le poids de son cœur, du printemps et de la nuit.

La solitude dans le bowling-green était si paisible que, par instants, il parlait haut.

Se sentir pas écouté fait qu’on parle.

Il se promenait à pas lents, la tête baissée, les mains derrière le dos, la gauche dans la droite, les doigts ouverts.

Tout à coup il sentit comme le glissement