Page:Hugo - L'Homme qui rit, 1869, tome 3.djvu/152

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séant, la porte de la cahute vestiaire était entr’ouverte, Dea apparaissait dans l’entre-bâillement. Elle avait dans les yeux et sur les lèvres son ineffable sourire. Elle se dressait charmante, dans la sérénité inconsciente de son rayonnement. Il y eut une sorte de minute sacrée. Gwynplaine la contempla, tressaillant, ébloui, réveillé ; réveillé de quoi ? du sommeil ? non, de l’insomnie. C’était elle, c’était Dea ; et tout à coup il sentit au plus profond de son être l’indéfinissable évanouissement de la tempête et la sublime descente du bien sur le mal ; le prodige du regard d’en haut s’opéra, la douce aveugle lumineuse, sans autre effort que sa présence, dissipa toute l’ombre en lui, le rideau de nuage s’écarta de cet esprit comme tiré par une main invisible, et Gwynplaine, enchantement céleste, eut dans la conscience une rentrée d’azur. Il redevint subitement, par la vertu de cet ange, le grand et bon Gwynplaine innocent. L’âme, comme la création, a de ces confrontations mystérieuses ; tous deux se taisaient, elle la