Page:Hugo - La Légende des siècles, 1e série, édition Hetzel, 1859, tome 2.djvu/163

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Apporte dans l’égout le reflet du glacier ;
Ils traînent avec eux la Suisse, quoi qu’on dise ;
Et les pâles aïeux sont dans leur bâtardise ;
Nos héros sont mêlés à leurs rangs, Nos grands noms
Sont de leurs lâchetés parents et compagnons,
De sorte que, dans l’ombre où César supplicie
Le Salzbourg, la Hongrie aux fers, la Dalmatie,
Quand Fritz jette au bûcher le Tyrol prisonnier,
Quand Jean lie au poteau l’Alsace, quand Reynier
Bat de verges Crémone échevelée et nue,
Quand Rodolphe après Jean et Reynier continue,
Quand Mathias livre Ancône au sabre du hulan,
Quand Albrecht Dent-de-Fer exécute Milan,
Autour des nations qui râlent sur la claie,
Furst, et Guillaume Tell, et Melchthal font la haie !

Est-ce qu’ils oseront rentrer sur nos hauteurs,
Ces anciens laboureurs et ces anciens pasteurs
Que l’Autriche aujourd’hui caserne dans ses bouges ?
Est-ce qu’ils reviendront avec leurs habits rouges,
Portant sur leur front morne et dans leur œil fatal
La domesticité monstrueuse du mal ?
S’ils osent revenir, si, pour faveur dernière,
L’Autriche leur permet d’emporter sa bannière,
S’ils rentrent dans nos monts avec cet étendard
Dont l’ombre fait d’un homme et d’un pâtre un soudard,