Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/227

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La journée s’égrappait encore facilement jusqu’à quatre heures. Il relisait de vieilles lettres de parents et d’amis depuis longtemps morts ; il feuilletait quelques-uns de ses livres, en dégustait quelques passages, mais vers les cinq heures, il commençait à souffrir ; le moment approchait où il allait falloir se rhabiller ; l’idée seule de déguerpir lui réprimait la faim, et, certains dimanches, il ne bougeait pas – ou bien s’il appréhendait un tardif appétit, il descendait en pantoufles et il acquérait deux petits pains, un pâté ou des sardines. Il avait toujours un peu de chocolat et de vin dans un placard et il mangeait, heureux d’être chez lui, de jouer des coudes, de s’étaler, d’éviter, pour une fois, la place restreinte d’un restaurant ; seulement, la nuit était mauvaise ; il se réveillait, en sursaut, avec des tiraillements et des frissons ; quelquefois l’insomnie durait une heure, et l’obscurité animant toutes les idées tristes, il se rabâchait les mêmes plaintes que dans le jour et il en arrivait à regretter de n’être pas un concubin. « Le mariage est impossible, à mon âge, se disait-il. Ah ! Si j’avais eu, dans ma jeunesse une maîtresse et si je l’avais conservée, je finirais mes années avec elle, j’aurais, à mon retour, ma lampe allumée et ma cuisine prête. Si la vie était à recommencer je la mènerais autrement ! je me ferais une alliée pour mes vieux jours ; décidément, j’ai trop présumé de mes forces, je suis à