Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/178

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gnée à laquelle Cyprien répondit par un aimable sourire, en triant soigneusement les feuilles encore sèches. La conversation s’engagea. Cyprien y mêla André en train d’examiner le visage de la femme remontant son voile pour boire une gorgée de bière.

C’était une belle fille qui atteignait la trentaine. Elle semblait dure de chairs et la figure un peu fatiguée, blanche ainsi qu’un navet et tapotée de violet sur le haut des joues, était comme enfiévrée par deux grands yeux d’un bleu-clair, réverbérant du vert d’eau par places, les yeux d’une fière rosse, pensa le peintre qui en avait connu de pareils. Elle causait avec un certain bagout, possédait un vague ton de femme bien élevée, était simplement mise ; mais elle portait sur sa robe d’une bonne faiseuse, de beaux bijoux qui donnaient à réfléchir au peintre, en train de supputer le prix qu’elle pouvait valoir.

André la trouvait charmante. Au sortir de ses réflexions et de ses tristesses, il vit en elle un dorlotement féminin assoupli par un simulacre d’éducation et de bienséance. Cyprien se dérangea sous le prétexte d’aller quérir un journal, et quand il revînt, il refusa d’occuper sa place, poussant André près de la fille. Il imprima un nouveau branle à la conversation qui se mourait, amena André à débiter ces plaisanteries médiocres dont le succès est assuré près des femmes.

Elle riait, lui répondant par de petits coups d’éventail sur les doigts, montrant son bras qu’elle avait un peu grassouillet et blanc, bavardant de choses